vendredi 22 février 2013

> La persistance du livre


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Quidam est une maison d’éditions qui ne mâche pas ses mots mais les bichonne, les choisit, les susurre, les partage, les donne à déguster… Pascal Arnaud, son chef d’orchestre, avait réuni hier soir à la librairie Charybde, un panel enthousiaste d’écrivains, traducteurs, éditeurs et autres joyeux enragés-dérangés de la chose écrite, venus là pour égrener quelques pépites de son joli catalogue. Ici ou , on n’en avait parlé, et malgré le froid, la crise, la tempête, tout un chacun conflua des noires artères de la nuit gare-de-lyonnaise (certains venus de contrées fort lointaines) vers l’antre au livres qui accueillait. On se pressa, on se tint chaud, et aux collisions foutebaulesques d’un Bordeaux-Kiev hautement annoncé, on préféra pourtant ce modeste mais stimulant spectacle de passeurs de mots. On était serré comme des livres et l'on se tordait le cou pour mieux entendre dire - car si certains sont grands, d’autres sont petits. Et entre le coup de cœur des uns, le choix définitif des autres, il fallait entendre comment parle de ses livres un éditeur qui aime éditer…

Quidam, j’y avais déjà goûté. Je me souviens notamment du premier titre de leur catalogue, Le son de ma voix, ce récit bouleversant de l'écrivain écossais Ron Butlin (nous en avions parlé ici). J’ai acheté hier Visites de nuit, ce qui pourrait en être la suite, mais une suite qui creuse vers l’avant, nous plonge dans l’âpreté d’une adolescence endeuillée. Il y avait eu la surprise de Liquide (Philippe Annocque). Il y avait eu l’immense Jirgl de Renégat, roman du temps nerveux. Il y avait eu déjà un peu de B.S. Johnson et même (une perversion ?) son biographe avant lui... Mais les territoires de Quidam sont vastes et on nous a mis hier le pied haut à l’étrier.

Bref, c’était drôlement bien, de s’écouter avoir envie de lire et d’entendre parler de ces auteurs, connus ou moins connus. De Brinkmann et de Rome, regards, de Josipovici et de Moo Pak, de Nick Barlay, l'homme à La femme d'un homme qui, de la riante Autriche (sourire bernardhien) d'une Brève histoire de pêche à la mouche de Paulus Hochgatterer, de Denis Decourchelle et de La persistance du froid. D'en entendre parler  avec autant de conviction.

Mais il faut bien se quitter un jour. Alors on est tous repartis l'eau à la bouche (sans en avoir pourtant bu tant que cela). On est tous repartis avec une drôle d’envie de faire durer l’hiver jusqu’au mois de mai, du papier plein les mains.






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