mercredi 24 mars 2010

> En rade
















MDA nous a laissés en rade.

Plus d’un lecteur de son blog, dont j’étais, s’est au moins une fois demandé qui pénètrerait cet espace-là pour y mettre un point final ou quelques points de suspension. C’est malheureusement chose faite. Libération (où elle a été journaliste une quinzaine d'années) nous annonce son décès dans un post daté du 19 mars.

Marie-Dominique Arrighi a conduit une expérience d’écriture humaine et radicale. Atteinte d’un premier cancer en 2005, puis victime d’une rechute en 2009, elle a tenu le journal de sa maladie jusqu’au 18 février dernier. Un journal libre et exigeant, souvent drôle. Un journal qui pour beaucoup était devenu un «compagnon de toile ». On s’était attaché à elle, à son écriture piquante, à ces brèves de vie entre couloirs d’hôpitaux, vacances en Corse, chimios, baisses de régime et rémissions. K, histoires de crabe a atteint une audience rare et a suscité plus de 12000 commentaires dont près de 2000 pour son seul dernier billet. Mais ce succès (il faudrait plutôt parler d’estime) n’a jamais modifié le ton ni l’esprit du blog. L’écriture de MDA, vivante, incisive, souvent empreinte d’auto dérision, n’a jamais renoncé au souci de témoigner. Témoigner du corps, à la fois objet de souffrances, de traitements, de mises en scène et dont elle arrivait presque à nous faire oublier qu’il s’agissait du sien… Témoigner des conditions de travail en milieu hospitalier ; témoigner des aberrations du système médical comme du dévouement de certains soignants ; témoigner surtout d’une étonnante volonté de vivre, envers et contre tout ; témoigner, enfin, qu’écrire c’est résister.

Qu’on en juge simplement par ce dernier billet, dicté un mois avant sa mort :

"... «Et je t'écoute», dit le sténographe.


«Et nous voilà bien», lui répondis-je.

«Nous» étant respectivement Pierre Marcelle et moi-même, MDA, en direct de l'hôpital des Diaconesses, dans le 12e arrondissement de Paris. J'y étais transférée hier, de Saint-Louis, pour améliorer la prise en charge et la mise en place du traitement anti-douleur. C'est au premier étage d'une unité de soins palliatifs, mais je ne suis pas encore morte.

Et tenais à vous le dire, haut et fort."

Pourtant, le crabe a gagné, c’était couru.
Qu’il retourne donc à son vilain silence de crabe et que ce blog lui reste coincé entre les pinces !

Mes pensées vont ce soir aux proches de MDA.



MDA, K, Histoires de crabe. Journal d'une nouvelle aventure cancérologique.

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