jeudi 3 septembre 2020

> Le poème du jeudi (#173)

 

Du ciel nulle plainte

 

Du ciel nulle plainte
De la terre nulle plainte
Jour et nuit ils se regardent
Ton visage dans un mouchoir en papier qui avale sueurs et larmes
Et laisse se dissoudre le chagrin
Nulle plainte

/

Carolyn Carlson, « Poèmes et calligraphies », traduit de l’anglais par Jean-Pierre Siméon, in États provisoires du poème, N°18 : États-Unis – Poèmes transatlantiques.

 

jeudi 27 août 2020

> Le poème du jeudi (#172)

 

 

Les mots sont des oiseaux

Les mots sont des oiseaux.
Où sont-ils allés se percher,
Les ailes fatiguées,
Pour échapper au crépuscule ?
Le crépuscule est sur mes cheveux,
Le crépuscule est sur ma peau ;
Quand je m’allonge pour dormir,
Je ne suis pas sûre
De revoir
L’aube bénie.

/

Kamala Das (1934-2009) in Un feu au cœur du vent – Trésor de la poésie indienne des Védas au XXIe siècle. Poésie/Gallimard, 2020. Traduit de l’anglais par Maxime Shelledy (texte original en kérala).

jeudi 20 août 2020

> Le poème du jeudi (#171)

 

Moi, la brebis inepte,
personne n’est plus ignare que moi
je me demande
qui aura pitié du loup
et plus encore
qui donnera au loup sa sépulture
quand il mourra vieux
myope et infesté de poux

/

Manuel Silva Acevedo, in Loups et Brebis. Bruno Doucey, 2020. Traduit de l’espagnol (Chili) par Ana Luna Fidèle et Isabel Mordojovich.

 

jeudi 13 août 2020

> Le poème du jeudi (#170)

 

 

La sottise est comme le bambou :
vide au-dedans mais inébranlable.

/

Tao Li Fu, in Le Livre des petits étonnements du sage. Cheyne éditeur, 2016. Traduit du chinois par Meng Ming.

jeudi 6 août 2020

> Le poème du jeudi (#169)

 

 

[…]

mais mange, mangeur ! – crois
que la vie te regarde
encor ; découvre-toi

le cœur, avale, abuse
de ces bouchées confuses,
tires-en de la joie !

mais manger : sur le pouce,
bout de table, accoudé ;
en fond : la chanson douce

d’un impossible été,
les cris d’un édenté,
une vieille qui tousse ;

regarde, mangeur, scrute
tes semblables, parmi
lesquels la foi recrute :

amoureux de papier,
porteurs de lettres mortes -
va, et ouvre la porte !

[…]

/

Julien Syrac, in Complainte du mangeur solitaire. Gallimard, 2019.

 

jeudi 30 juillet 2020

> Le poème du jeudi (#168)



Triste vitesse


à l’aube
comme sa mère qui fuyait pour éviter le couteau du père
comme son grand frère qui attendait que le père tombe ivre mort pour vite lui soustraire son couteau
l’ombre d’un gamin qui passe rapidement

en y repensant
toutes les vitesses sont tristes.

/

Kim Chudae, in « Poésie coréenne contemporaine », La Tête et les Cornes, 2014. Traduit du coréen par Benoît Berthelier.